
Kaloune subjugue le public avec son ode à la femme créole
Des textes subtilement choisis, un timbre de voix inimitable, une ambiance intimiste, tout était en place pour que la magie de Kaloune opère ce vendredi 15 octobre 2021 au Tamanoir.
L'émotion est palpable dès la première déclamation de la divine Kaloune. Le public tombe tout de suite sous le charme de cette nouvelle valeur sûre de la scène réunionnaise, meilleur espoir 2017 des Voix de l'océan Indien. À la faveur d'un jeu de lumières tamisées se fondant dans une atmosphère propice à la poésie, Kaloune a libéré ses talents de poétesse, conteuse, chanteuse et musicienne.

S'accompagnant d'un sampleur, d'un kayamb, instrument à percussion traditionnel du maloya réunionnais, ou d'une mbira, instrument traditionnel zimbabwéen s'approchant du xylophone et dont la fabrication est un art inscrit au patrimoine culturel mondial depuis décembre 2020, la poétesse a offert au public une ode à la femme créole, un voyage à travers son ancestralité. Sa chanson "Tapoulang", terme désignant le sexe d'une femme en vieux créole réunionnais, une de ses compositions, transcrit la douleur d'une "cafrine calbanon", qui rejette sa condition d'objet sexuel jusqu'à en perdre la raison. À La Réunion, une "cafrine" est une réunionnaise de type africain. Dans les années 1960, les hommes allaient dans les calbanons, anciennes cabanes d'esclave, chercher les faveurs de femmes créoles très pauvres désignées par l'appellation "femme calbanon". Un sujet sensible que Kaloune a mis en musique et interprète avec une empathie poignante !
À travers une interaction originale avec les spectateurs, l'artiste explique et contextualise le chant qu'elle s'apprête à leur interpréter. Car Kaloune guide son public sur le sentier musical qu'elle a tracé pour eux.

Sa voix magnifie ses
déclamations, teintées de créole, de grands poèmes tels "Allégeance" de René
Char, ou "Les Yeux d'Elsa" de Louis Aragon qu'elle s'approprie
complètement. Le public est conquis ! Chaque chant est salué par un
tonnerre d'applaudissements, notamment sa magistrale appropriation du "Natural
mystic" de Bob Marley. Toujours en hommage à la femme créole, son titre "Mon sové" - "mes
cheveux" en créole réunionnais aborde la
question sensible de l'esthétique.
Entre chant, poésie et musique, Kaloune s'est construit une voie singulière qui lui permet de rester proche de ses racines à travers ses écrits mais aussi en adaptant de grands textes de la littérature française à son héritage culturel. Cette pépite élue "Découverte péi" 2016 du festival Sakifo et prix Musiques de l'océan Indien 2017, a une vraie présence sur scène. Une certitude s'impose, il faut désormais compter avec Kaloune.